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 ARGUMENTAIRE POUR LA GESTION DE L'EAU Date : 08 Décembre 2010
Auteur(s) : Eau Bien Commun 13 Groupe 4 

D’ici 2050, quel que soit le modèle d’étude, toutes les prévisions font un seul et même constat. Une majorité des régions sur Terre sera soumise à de fortes tensions en approvisionnement en eau. La quantité d’eau disponible pour chaque individu dans la moitié des pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord aura diminué de moitié d’ici 2050. Même les grands états ni échapperont pas.

Argumentaire pour

La gestion directe de l’eau

 

 

Argumentaire Général

 

 

 

Quel est le vrai défi de l’eau ?

 

D’ici 2050, quel que soit le modèle d’étude, toutes les prévisions font un seul et même constat. Une majorité des régions sur Terre sera soumise à de fortes tensions en approvisionnement en eau. La quantité d’eau disponible pour chaque individu dans la moitié des pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord aura diminué de moitié d’ici 2050. Même les grands états ni échapperont pas. Les deux tiers des comtés des Etats-Unis connaîtront probablement de fortes restrictions d’eau[1].

 

à L‘eau est un enjeu majeur de l’humanité. Un enjeu de développement, de coopération, de stabilité... Bref, un enjeu de civilisation.

 

 

Que faire pour l’eau ?

 

Jusqu’à présent, la distribution de l’eau, l’assainissement et la préservation de l’eau brute sont encore trop largement conçus, de par le monde, comme une somme d’actions et non pas comme un ensemble faisant partie d’un tout. L’eau doit être soumise à une véritable vision politique garantissant les intérêts collectifs. Celle-ci doit absolument émaner des pouvoirs publics et être soumise au contrôle démocratique. « L’eau n’est pas nécessaire à la vie, l’eau c’est la vie ; »[2]. . Elle ne peut donc pas être un objet de convoitises. L’eau garantit la liberté de l’homme ou son complet asservissement. Elle ne doit pas être une marchandise et doit au contraire être indissociablement liée aux droits de l’homme au même titre que la liberté, l’égalité, l’équité et les autres notions fondamentales de l’humanité.

 

à L’eau n’est pas une marchandise. Elle doit être gérée par la puissance publique et soumise au contrôle démocratique sans exclusive.

 


Oui mais comment ?

 

Si l’eau fait l’objet d’un consensus quant à son intérêt vital, il n’en reste pas moins que son mode de gestion doit lui aussi faire partie de ce consensus. L’eau est gratuite, seul son acheminement et son traitement sont payants. L’exploitation de ces services ne doit pas être au seul profit de tiers mais au profit de la collectivité. Les marges d’exploitation n’étant plus dispersées, voire investies aléatoirement en bourse, elles bénéficieront directement aux usagers. Ces marges correspondront au prix à payer pour préserver la ressource et anticiper les besoins futurs dans le cadre d’une politique publique cohérente et réellement démocratique. L’eau peut être source de profit et c’est pour cela qu’elle est l’objet de convoitises contrairement à d’autres besoins publics. C’est donc au travers de services publics soumis à un contrôle strict que l’eau sera le mieux préservée et restera au profit de tous, et pas de tous ceux qui peuvent payer.

 

à L’eau doit être gérée par des services publics directement et ne peut pas être privatisée.

 

 

Faut-il exclure le privé ?

 

Non bien évidemment. L’eau a besoin du concours de tous. Mais sa gestion doit être directement publique. L’expertise et la compétence privées peuvent être utiles mais doivent se résumer à des interventions et non pas se transformer en une privatisation. Les délégations de service public correspondent de fait à une privatisation, même si c’est sous couvert public. L’eau nécessite une politique cohérente, à court, moyen et long termes, avec une vision incluant l’eau brute, l’eau potable, l’assainissement tout au moins. Seul les pouvoirs publics sont à même de la mener et d’être soumis à un contrôle citoyen.

 

à Le privé peut intervenir mais sans que cela induise des privatisations de fait, comme le sont les délégations de service public.

 

 

Une régie publique directe de l’eau, est-elle réellement efficace ?

 

La France fait figure d’exception. Dans le monde, et même aux Etats-Unis, l’eau est du ressort d’établissements publics. Dans notre pays, certaines régies ont toujours été gérées par le public. D’autres, qui avaient privatisé leur gestion, ont choisi le retour en régie directe depuis près de vingt ans. Ces expériences existent. Elles présentent un bilan positif dans leur ensemble.

 

à Les régies publiques ne sont pas des utopies. Leurs bilans existent. Le pilotage et le contrôle démocratiques en sont accrus.

 

 


 

Argumentaire Technique

 

 

 

Qui a compétence pour gérer l’eau ?

 

L’eau potable et l’assainissement sont gérés par les communes et pas par un service public national de l’eau car les ressources en eau douce sont partout différentes. C’est la raison pour laquelle la gestion de l’eau a été confiée aux communes. Depuis quelques décennies, les communes se sont regroupées en EPCI (Etablissements Publics de Coopération Intercommunale), pour gérer plus efficacement certains problèmes (transports, ramassage des ordures, eau,…).

 

 

Qu’est-ce qu’un EPCI ?

 

L’EPCI (Etablissement Public de Coopération Intercommunale) est un groupement de communes dans le but de résoudre plus efficacement certaines activités.


Les EPCI sont régis suivant 3 principes :


· le principe de continuité : les communes composant un EPCI doivent être contiguës et sans enclave.

· Le principe de spécialité : les EPCI sont créés pour prendre en charge certaines activités (obligatoires ou optionnelles).

· Le principe d’exclusivité : lorsqu’un EPCI prend en charge une activité, les communes n’ont plus à intervenir sur cette activité, hormis par le fait que certains élus municipaux font partie du conseil communautaire.

 

Il existe deux types d’EPCI :


· Les EPCI sans finances propres : les syndicats (SIVU, SIVOM, syndicats mixtes).

· Les EPCI à finances propres : les communautés (communauté de communes, communauté d’agglomération, communauté urbaine et bientôt métropole).

 

Une commune peut appartenir à plusieurs EPCI.

 

 

Comment est gérée l’eau ?

 

La collectivité (commune ou EPCI) peut gérer elle-même l’eau (on parle alors de gestion directe ou régie) ou la confier à un organisme externe, public ou privé (on parle alors de gestion déléguée). Ces deux méthodes sont exclusives.

 

 

Qu’est-ce que la gestion directe ?

 

L’établissement public (commune ou EPCI), qui a la compétence eau, assure directement la gestion du service de l’eau, avec son propre personnel.


L’établissement public a alors la responsabilité :


· du fonctionnement du service des eaux

· des relations avec les usagers

· des investissements à réaliser

· de la tarification et des émissions de factures

 

Il peut faire appel ponctuellement à de la sous-traitance, dans le cadre de marchés publics, pour des travaux biens définis et limités dans le temps.

 

 

On parle souvent de DSP, mais qu’est-ce que c’est ?

 

On appelle PPP (Partenariat Public-Privé) une collaboration à deux, un public et un privé, pour gérer un projet ou un service.

La DSP (Délégation de Service Public) fait partie des PPP. Malheureusement dans la plupart des cas le privé prend le dessus au détriment du public, donc des citoyens. C’est en fait une privatisation déguisée.

Dans le domaine de l’eau, la DSP est l’une des formes de la délégation. On ne peut parler de DSP que lorsque la rémunération du délégataire est largement fonction de la consommation ou lorsque la prise de risque est assurée par le délégataire. Dans le cas contraire, on parle de marché public. Il y a eu beaucoup d’annulations de contrats dues au non respect de cette règle.

 

 

 

Quelle est la place du citoyen ?

 

Hormis le fait qu’il élit ses représentants municipaux, il peut intervenir au travers des associations. La CCSPL (Commission Consultative sur les Services Publics Locaux) est, depuis 2003, obligatoire dans les communes de plus de 10.000 habitants ou dans les EPCI de plus de 50.000 habitants.

Sa mission principale est de placer les citoyens et les associations au cœur du débat sur les services publics locaux dont l’eau. Toutes les décisions importantes doivent lui être soumises. Mais elle n’a qu’un rôle consultatif.


Composition :


· un président (maire ou président de l’EPCI)

· des élus

· des associations

 

Dans le cadre de la régie, les citoyens peuvent être représentés au Conseil d’exploitation.

 

 

Comment sont informés les citoyens ?

 

Tous les ans, les collectivités (communes ou EPCI) doivent informer les citoyens sur la gestion de l’eau et de l’assainissement. Six mois après la fin de l’exercice, la collectivité doit mettre à la disposition des citoyens un document (RPQS : Rapport annuel sur le prix et la qualité de l’eau), document qui est obligatoire, public et dont le contenu est précisé dans le CGCT (Code Général des Collectivités Territoriales).

Il faut remarquer que la transparence, qualité première de la démocratie, n’est pas le point fort des collectivités.

 

 

Aujourd’hui, on parle d’un nouveau type de société, la SPL. Qu’est-ce que c’est ?

 

La SPL (Société Publique Locale) se rapproche beaucoup de la SEM (Société d’Economie Mixte). La seule différence est la composition du capital. Dans la SEM, le capital public est de 50% à 85% et le capital privé est de 15% à moins de 50%. Pour la SPL, le capital public est de 100%.

 

La SEM est soumise à la concurrence alors que la SPL est assimilée à un opérateur interne de la collectivité locale et peut se voir confier des missions en direct, sans mise en concurrence.

La SPL n’est pas soumise à la CCSPL.

La SPL est la panacée pour les collectivités qui ne veulent pas avoir les contraintes du domaine public.

 

 

On parle souvent de l’importance des fuites, quel est le problème ?

 

Dans la gestion de l’eau potable, deux paramètres sont importants : - la quantité d’eau distribuée – la quantité d’eau facturée. On désigne sous le terme VOLUME NON COMPTE, la différence entre les deux quantités précédentes. Ceci recouvre la quantité d’eau non comptabilisée, à savoir : - les bornes incendie – les prises d’eau des fontainiers pour nettoyer les rues ou arroser les espaces verts – les fuites d’eau dues à l’état du réseau – les vols, …. Ces volumes non comptés peuvent atteindre jusqu’à 50% du volume distribué.

 

La collectivité ou le délégataire calculent le prix du m3 d’eau en fonction de la quantité distribuée. Au plus les volumes non comptés seront importants, au plus le prix sera élevé. Il est donc important de réduire au maximum ces volumes non comptés. Certains sont incompressibles comme les bornes incendie ou les prises d’eau des fontainiers. D’autres, les plus importantes, peuvent être réduits notablement, en améliorant la qualité du réseau pour les fuites, ou les méthodes de branchement pour les vols. La politique de la collectivité est très importante dans ce domaine.

 

 

 Quelle est l’organisation nationale de la gestion de l’eau ?

 

La gestion de l’eau a été déclarée, en 1790, du domaine communal. On peut regretter qu’il n’y ait pas un service public national de l’eau. Donc, aujourd’hui, la gestion de l’eau est de la responsabilité des communes ou des regroupements de communes (EPCI – Etablissement public de Coopération Intercommunale). Toutefois ces communes et regroupements de communes, ne peuvent agir que dans un cadre strictement réglementé par deux choses :

 

- L’organisation nationale
- 
Les lois

 

C’est ces deux points que nous allons aborder, plus un troisième, qui est une entrave à la gestion démocratique de l’eau : le lobbying.

 

1. L’organisation nationale

 

Le territoire français est découpé en bassins versants ; ainsi nous faisons partie du bassin versant du Rhône. La France est découpée en 6 bassins versants et le bassin versant du Rhône, s’étend des contreforts du Jura jusqu’à la Méditerranée et à la Corse.

 

Chaque bassin versant est piloté par un Comité de bassin, au sein d’une Agence de l’eau, la notre s’appelle agence RMC (Rhône, Méditerranée, Corse).

 

Les Comités de bassin sont composés de représentants du monde agricole, de représentants des industriels de l’eau et de représentants des usagers (ménages, agriculteur, industriels). Le Comité de bassin vote les redevances (taxes pour l’amélioration des réseaux et contre la pollution) et distribue les subventions aux divers acteurs. Ainsi les redevances sont fortes pour les ménages, fortes pour les industries et faibles pour les agriculteurs et les subventions sont fortes pour les agriculteurs et les industriels de l’eau et faibles pour les collectivités.

 

Les agences de l’eau sont regroupées au sein d’un organisme national, l’ONEMA (Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques), qui est rattaché au Ministère de l’Environnement.

 

2. Les lois

 

Des lois (1964, 1992, 1993, 1995) ont fixé le découpage du territoire français ainsi que la lutte contre la pollution et contre la corruption (1993 – Loi Sapin). La loi de 1964 qui a mis en place les Comités de bassin, avait de grandes ambitions qui n’ont pas été suivi d’actions.

 

En 2000, la Directive Cadre sur l’Eau (DCE) est établie en Europe. Cette directive fixe des objectifs pour la restauration de la qualité des eaux superficielles et souterraines. L’objectif général est d’atteindre pour 2015, le bon état des différents milieux sur le territoire européen.

 

Chaque état européen devait transposer cette directive sur son territoire. Sous la pression du monde agricole et des industriels de l’eau, la France mettra 6 ans pour transposer cette directive ; c’est la Loi sur l’Eau et les Milieux Aquatiques (LEMA) de 2006.

 

Cette loi fixe un certain nombre d’objectifs :

 

- L’objectif général est d’atteindre d’ici 2015 le bon état des  différents milieux sur tout le territoire français.

- Elle confirme la gestion par bassin versant.

- Elle affirme que l’usage de l’eau appartient à tous et proclame le  droit d’accéder à l’eau potable, dans des conditions  économiques acceptables par tous.

- Elle confirme la nécessité d’améliorer la transparence de la  gestion des services publics d’eau et d’assainissement.

- Elle confirme une gestion équilibrée et durable de la ressource  en eau, qui prenne en compte les adaptations au changement  climatique.

 

Cette loi s’est traduite par une soixantaine de décrets d’application dont les derniers ont été promulgués en 2009.

 

Dès à présent, beaucoup pensent que l’objectif de 2015 ne sera pas atteint, parce qu’il nuit à beaucoup d’intérêts particuliers.

 


Dernière mise à jour le 18/07/2017