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Culture féministe
Sexe, genre et sexualité : rentrée chaude pour la droite !
Date :
05/09/2011
Auteur(s) :
Henriette Zoughebi
Source :
CNDF
80 députés UMP et du Nouveau Centre, dans le sillage de Christine
Boutin, présidente du Parti Chrétien Démocrate, et d’associations
familiales catholiques, soutenus par Jean-François Copé, secrétaire
général de l'UMP, s’indignent du contenu de certains manuels de sciences de la vie et de la terre (SVT) de la classe de 1e qui traitent de la distinction entre l'identité sexuelle, le genre et l'orientation
sexuelle.
Sexe, genre et sexualité : rentrée chaude pour la droite !
80 députés UMP et du Nouveau Centre, dans le sillage de Christine
Boutin, présidente du Parti Chrétien Démocrate, et d’associations
familiales catholiques, soutenus par Jean-François Copé, secrétaire
général de l'UMP, s’indignent du contenu de certains manuels de sciences de la vie et de la terre (SVT) de la classe de 1e qui traitent de la distinction entre l'identité sexuelle, le genre et l'orientation
sexuelle. Il s’agit pour eux de défendre leur vérité, héritée d’une
conception religieuse de l’humanité.
Or, science et vérité ne font pas bon ménage. La science est le reflet
de l’état des recherches et des savoirs à un moment donné : elle est en
perpétuelle évolution et ne peut s’accommoder d’un ordre figé, fondé sur des croyances édictant des vérités immuables à tout jamais. Des
biologistes, des neurobiologistes, des généticien-ne-s, … s’accordent
pour dire qu’il existe une distinction entre le sexe, le genre et la
sexualité :
- un sexe pluriel (chromosomique, hormonal, gonadique,…) qui ne
détermine à l’avance ni le genre ni la sexualité d’un individu ;
- un genre qui traduit la construction sociale et culturelle de la
différence des sexes et varie en fonction des époques, des lieux et des
milieux socioculturels,
- et une sexualité potentiellement variable tout au long de la vie, sans
corrélation avec le sexe ou le genre de l’individu qui la pratique.
C’est dans cet état des savoirs scientifiques que s’inscrivent le
nouveau programme de SVT et les manuels incriminés.
Pour justifier l’archaïsme de leur position, ces parlementaires mettent
en avant « la confusion » et « l’absence de repères » que pourraient
créer chez un-e jeune l’apprentissage de la théorie du genre. Comment un concept qui permet de déconstruire les argumentations essentialistes
fondées sur un prétendu déterminisme biologique pour discriminer les
individus en fonction de leur sexe, de leur sexualité ou du genre qu’ils
se donnent, peut-il créer de l’insécurité et de l’angoisse ? Notre
société ne l’est-elle pas davantage par les discriminations, les
violences et la précarité qu’elle génère ? Ces parlementaires
auraient-ils oublié les conclusions du rapport sur les discriminations
en milieu scolaire remis au ministre de l’Education le 22 septembre
2010 [2] : l’ampleur de l’homophobie et du sexisme à l’école nécessitent que l’institution agisse contre ces discriminations pour sécuriser le parcours scolaires des élèves qui en souffrent ? Vouloir balayer les apports scientifiques du genre, ce n’est pas protéger les jeunes, c’est au contraire les fragiliser en reculant sur la lutte contre le sexisme et l’homophobie.
Consciente de cette situation, j’ai fait adopté par la Région en octobre
2010, le dispositif "Jeunes pour l'égalité" afin d'engager les jeunes
dans une démarche active et participante contre le sexisme et
l'homophobie, et en faveur de la laïcité en tant que principe
fondamental pour vivre ensemble, en toute égalité, au-delà les
différences d'opinion.
Le Pass Contraception mis à disposition des jeunes, filles et garçons,
depuis février 2011, s'inscrit dans cette même volonté de donner aux
jeunes des moyens de construire leur propre sexualité, en toute liberté,
c'est-à-dire en ayant accès à des spécialistes qui peuvent leur
transmettre des connaissances précises pour qu'ils et elles vivent une
sexualité libérée de craintes obscurantistes ou de menaces d'éventuelles
maladies sexuellement transmissibles ou de grossesses non désirées.
Enfin, par la gratuité des manuels scolaire, la Région investit pour que
chaque jeune étudie dans les meilleures conditions et ait accès par ces
nouveaux manuels aux connaissances les plus actuelles. Les manuels de SVT incriminés ne méritent pas la fronde actuellement menée par des députés terrorisés par l'idée de la multiplicité et de la variabilité de
l'identité. Pourtant, chacun-e de nous a pu en faire l'expérience : nous
ne sommes pas les mêmes à 5 ans ou à 20 ans, tout en restant la même
personne.
*Henriette Zoughebi*
*Vice-présidente du Conseil régional d'Ile-de-France en charge des
lycées et des politiques éducatives*
Dernière mise à jour le 18/07/2017